La loi de 2018 sur la liberté de choisir son avenir professionnel a profondément transformé le marché de la formation continue en France. Pour évaluer ces changements, le Céreq et la Direction de l’animation de la recherche des études et des statistiques (Dares) du ministère du Travail ont réalisé une enquête sur les transformations de l’offre de formation (ETOF) entre 2022 et 2023. Cette étude, la première de grande ampleur réalisée auprès des organismes de formation, offre un panorama complet de l’évolution de leur activité.
# Un marché en pleine mutation et en forte croissance
- Depuis la réforme de 2018, plusieurs changements structurels ont modifié le paysage de la formation professionnelle continue :
- Désintermédiation et monétisation du compte personnel de formation (CPF)
- Obligation de certification des organismes de formation (Qualiopi) pour pouvoir bénéficier de fonds publics ou mutualisés
- Mise en place de France compétences et des opérateurs de compétences (OPCO)
- Libéralisation de l’apprentissage
- Après une année 2020 marquée par le début de la crise sanitaire – qui a transformé les conditions de réalisation des formations – les organismes de formation (OF) ont enregistré une hausse très importante de leur chiffre d’affaires en 2021, atteignant un total de 19 milliards d’euros. Le nombre d’organismes a également augmenté de 12 % entre 2019 et 2021, témoignant d’un dynamisme accru du secteur.
# Un marché marqué par l’augmentation des micro-organismes de formation
- En 2021, le marché de l’offre de formation est dominé par les organismes privés à but lucratif, qui représentent 86 % de l’effectif total, 57 % du chiffre d’affaires total et 70 % des entrées en formation. Mais 72 % des organismes de formation créés entre 2018 et 2021 sont des micro-organismes de formation qui regroupent principalement des formateurs individuels et des entreprises individuelles. Bien que très nombreux (56 % de l’effectif total), leur poids dans le chiffre d’affaires total demeure très faible (seulement 8 %).
- Les organismes privés à but non lucratif (13 % de l’effectif total) et les organismes publics (1 %) jouent également un rôle crucial, notamment dans la formation des demandeurs d’emploi et des alternants. Ils génèrent respectivement 21 % et 22 % du chiffre d’affaires global.
- Les employeurs restent les principaux clients des organismes de formation, mais la réforme de 2018 a permis une diversification des publics et des sources de financement :
- Les organismes publics et privés à but non lucratif ont notamment bénéficié d’une hausse des financements par les OPCO.
- De plus, environ un OF sur cinq déclare dans l’enquête avoir reçu des financements au titre du CPF en 2021.
# Croissance des micro-organismes de formation sous-traitants
- En 2021, un tiers des organismes de formation (hors micro-OF) a confié une partie de leurs activités à des sous-traitants, principalement de l’animation de formation
- Pour plus d’un donneur d’ordres sur 2, cette pratique permet d’élargir le contenu de leur offre de formation.
- Si la part des OF sous-traitant une partie de leur activité de formation est stable sur la période 2019-2023, la proportion des OF ayant été sous-traitants (principalement les micro-OF) ne cesse de progresser.
# Croissance des formations en distanciel
- Les modalités pédagogiques ont également évolué depuis la réforme, avec une augmentation des formations en distanciel et bimodales.
- Les organismes publics, en particulier, optent davantage que les autres pour des formations certifiantes et diplômantes.
# Certification Qualiopi : une mise en œuvre difficile pour les micro-organismes
- Depuis le 1er janvier 2022, tout prestataire d’actions concourant au développement des compétences doit être certifié Qualiopi pour bénéficier de financements publics ou mutualisés.
- La moitié des organismes de formation sont certifiés Qualiopi, mais seulement un tiers des micro-OF.
- La certification représente un investissement humain et financier important, ce qui explique pourquoi de nombreux micro-OF ne s’engagent pas dans ce processus.
De nouvelles dispositions réglementaires, entrées en vigueur fin 2023, viennent encadrer davantage l’activité des organismes de formation. Notamment, un plafonnement à 80% des missions sous-traitées pour le CPF a été instauré, et l’obligation de certification Qualiopi a été étendue à certains sous-traitants. Par ailleurs, l’instauration de la participation forfaitaire obligatoire pour le CPF devrait impacter l’activité des organismes de formation en 2024.
Sous-traitance, CPF, Qualiopi :
quels enjeux pour les organismes de formation depuis la réforme de 2018 ?
Jean-Marie Dubois, Hugo Schianchi
Céreq Bref n° 459/460, 2024, 4p.